Comment le Grand Est met les médias sous contrôle
La région Grand Est n’accepte pas que les Alsaciens considèrent que leur région naturelle soit toujours l’Alsace. Idem pour les Lorrains ou les Champardennais. Elle cherche donc à faire oublier les anciennes régions en créant une nouvelle identité grandestienne fabriquée de toute pièce.
Après avoir dépensé plus de 8 millions d’euros dans la communication en 2018, elle a récemment lancé un appel d’offre (No 19-99082) de 580 000 euros HT pour concevoir une stratégie de communication externe globale permettant de construire le fait régional et d’écrire un récit commun faisant sens auprès des habitants et des partenaires de la collectivité.
Cette fuite en avant financière, sévèrement dénoncée par la Cour des Comptes, ne s’arrête pas là. Face à une population qui refuse qu’on lui impose une région factice dont elle ne veut pas, l’exécutif régional durcit sa politique en mettant en place un contrôle des médias, notamment des chaines de télévision locales comme Alsace20, Mirabelle TV, Vosges TV.
L’instrumentalisation des chaines de télévision
Le terme de contrôle des médias, appliqué généralement à des régimes peu démocratiques, n’est-il pas un peu exagéré ? A vous du juger au vu des éléments suivants.
Rappelons que la plupart des chaines locales sont subventionnées par les régions ou d’autres collectivités car elles présentent un intérêt qui n’est pas seulement commercial en participant à la structuration des communautés territoriales en fournissant une information et des éléments culturels qui concernent directement les habitants. Suite à la fusion des régions le Grand Est s’est donc substitué à la région Alsace. Ainsi pour 2019, Alsace 20 touchera 539 513 euros selon le contrat d’objectif et de moyens. Mais le changement ne s’arrête pas là. Alors que cette télévision revendiquait d’être la chaine 100% Alsace, avec des programmes qui concernent ce territoire, ce n’est plus le cas aujourd’hui.
En effet, le Grand Est conditionne ses subventions à la création et à la diffusion de reportages sur tout le Grand Est. Fini la chaine 100% alsacienne ! Le contrat d’objectif qui dicte les obligations aux chaines précise l’objectifs fondamental : « apporter aux habitants du Grand Est des informations sur la vie locale et d’intérêt générale de leur nouveau territoire en couvrant des domaines variés relevant des compétences régionales tels que l’économie, la formation, l’emploi, la culture, l’aménagement du territoire, les transports, etc. favorisant ainsi la découverte et la compréhension des nouveaux enjeux et la construction d’une nouvelle région ».
Ainsi, les télévisions sont au service d’un objectif clairement politique dicté par l’exécutif régional.
Une atteinte grave à la démocratie et à la liberté de l’information
Pour les différents magazines que devront produire les chaines, « chaque numéro devra intégrer des reportages pédagogiques, de différents formats, avec le souci d’une équité dans les sujets traités et d’une couverture équilibrée de tout le territoire du Grand Est. »
Et pour être certain que les journalistes travaillent bien au service des politiques régionales, « une proposition est attendue sous forme de pilote et sera validée par la Région Grand Est. »
Le contrat d’objectif précise encore que « les agents du service dédiés au sein de la Direction de la Culture de la Région Grand Est devront établir un comité de pilotage pour suivre les différentes étapes, de la sélection à la diffusion ». Si ce n’est pas une mise sous tutelle, cela s’appelle comment ?
Ainsi, c’est le service de la culture de la région qui va se charger de contrôler le travail des télévisions afin de s’assurer qu’elles œuvrent dans le sens souhaité par le pouvoir politique.
Cette instrumentalisation des médias par le pouvoir politique est absolument choquante et à la limite de la légalité car c’est une véritable « régionalisation » (comme on dit ailleurs nationalisation) d’une entreprise privée. Il est inquiétant que la liberté des médias soit bridée par le pouvoir politique. Ces tentatives de manipulation de l’information sont indignes d’une démocratie.
Que la région Grand Est se sente obligée de tomber dans ces agissements en dit long sur l’inanité d’une fusion imposée par la force. Ces dérives exigent de dissoudre cette bureaucratie tentaculaire. Et que les élus favorables à la Région ne continuent pas à nous raconter qu’elle ne porte en rien atteinte à l’identité de l’Alsace : elle vise tout simplement à l’effacer.